Coups de coeur
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Burn out dans le « Building »

Le monde de l’entreprise est impitoyable. Léonore Confino l’a bien compris et a réussi à en faire une excellente peinture.

L’idée de départ : Un Building. 13 étages. Nous sommes chez Consulting Conseil, une entreprise qui a pour absurde mission de coacher les coachs, de conseiller les conseillers. Le président directeur général amorce la pièce en motivant ses employés avec un discours démagogique, superposant avec éloquence banalités et techniques de communication. Puis, suivant la chronologie d’une journée de travail, on se hisse dans le building au rythme soutenu d’une scène par étage : hôtesses, comptables, agents d’entretien, cadres, directeurs des ressources humaines, chargés de communication s’agitent, déjeunent, prospectent, brainstorming et surtout, se donnent en pâture à une société qui revendique sans ciller « la rentabilité avant tout ».

A partir de là, Léonore Confino a écrit une pièce caustique, cruelle et tellement réaliste.

C’est bien écrit, avec des dialogues justes, plein d’humour. A de nombreuses reprises, on se surprend à superposer des images personnelles de collègues. Les mots sont ceux que nous entendons chaque jour mais qui, poussés à l’extrême, montrent toute leur absurdité. En particulier le discours du PDG à ses actionnaires en ouverture puis en clôture de la pièce. Les mots changent et tout le sens avec. Les conseillers deviennent des oreillers auxquels l’entreprise vend du sommeil. C’est savoureux !!!

Les cinq comédiens, excellents, servent ce texte à merveille. En changeant seulement un détail, une paire de chaussures, des lunettes, un foulard, ils vont interpréter les 36 personnages de la pièce, montrant ainsi que l’identité réelle et personnelle s’efface sous la fonction et le costume.

La mise en scène de Catherine Schaub participe aussi beaucoup à la réussite de la pièce. Un décor très simple mais modulable permet de créer en un clin d’oeil les différents espaces de travail.

Dans ce court passage, elle explique parfaitement sa vision : « La mise en scène tiendra compte de la chronologie d’une journée de travail : le parking à 8 heures, puis une scène par étage jusqu’au sommet du building, à 20 heures. Un tour de cadran qu’on ne peut arrêter, une ascension vers la catastrophe. Dans cette temporalité, je voudrais travailler sur la mise en tension des étages : au fil de la journée, plus on se hisse, plus les personnages étouffent sous la pression sociale : leurs rêves s’étriquent, le langage se mécanise…à en devenir fou. »

Les scènes s’enchainent donc au rythme endiablé d’une journée de travail. Tout commence dans le métro. Par la position de leurs corps et la voix-off qui nous livre les pensées de chacun, on a vraiment l’impression d’y être. On se dit immédiatement « Waou mais c’est tout à fait ça ». Puis au fil des heures nous allons monter dans les étages, passant du parking à la salle de réception où est donnée une petite fête pour la clôture des comptes. Et plus on monte plus on voit les personnages se déshumaniser, à en devenir fou.

Le tout scandé par l’écrasement de pigeons sur les façades vitrées du building, trompés par le reflet du ciel dans les vitres. Excellente métaphore des espoirs vains des Hommes dans le monde du travail. On se surprend à rire, mais de plus en plus jaune, un peu mal à l’aise tout de même. Ce qui est certain, c’est qu’en sortant du théâtre on ne peut oublier le bruit que font ces malheureux pigeons en s’écrasant.

Alors un seul conseil : n’attendez pas. Achetez une place, allez voir cette pièce avant le 30 juin et après… parlez-en autour de vous. 

Si je vous ai donné envie d’y aller c’est ici que ça se passe : Théâtre Mouffetard

Je voudrais profiter de ce billet pour remercier encore une fois le garçon qui m’a permis de découvrir cette pièce. Il se prénomme Laurent et tient un blog avec beaucoup de talent et d’humour. Ca s’appelle « Des fraises et de la tendresse« .

Casting

Une pièce de Léonore Confino

Mise en scène Catherine Schaub

Avec Bruno Cadillon, Léonore Confino, Olivier Faliez, Yann de Monterno, Miren Pradier

Création musicale R. Jéricho et Aldo Gilbert – Chorégraphies Magali B. – Scénographie Sophie Jacob – Lumières Vincent Grisoni et Marc Gingold – Costumes Julia Allègre     

Je vous laisse avec la très jolie voix de Kimbra, « Plain Gold Ring ».

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Ancienne parisienne devenue lyonnaise… pas très bavarde voire même un peu « sauvage » et surtout passionnée de street art. Flâneuse urbaine, j’aime partager mes plus belles découvertes avec vous !

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